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Rétrospective 2011 - X, l’équarrissage pour toutes ?

Au dictat du profit, aucun territoire n'échappe. Celui du X ne fait pas exception. Peu importe les dégâts. Les milliards générés par cette industrie valent bien quelques sacrifices « orificiels ». Aux quelques témoignages sur l'envers du décor, on opposera bien vite la liberté d'expression et/ou la liberté d'entreprendre pour justifier même l'injustifiable. Des crimes de masse sur les corps des milliers d'acteurs et actrices de films X, chairs à canon des clients et des producteurs-souteneurs, à qui l'on évite, assez soigneusement, de trop souvent donner la parole... comme aux prostituées...

 

 

Le décor

Le X rapporte 97 milliards de dollars en 20061. Internet est, en quelques années, devenu le plus important vecteur de diffusion de cette industrie. Aujourd'hui, 35% du total des téléchargements seraient de nature pornographique. Selon R. Poulin2, « l'industrie de la pornographie est largement dominée par les organisations criminelles, qu'elles soient petites ou grandes ». Cette industrie est souvent une des premières à investir dans les nouvelles technologies en utilisant les dernières techniques disponibles et en investissant régulièrement. Dorcel a été par exemple un acteur majeur de la VOD en France et vient récemment de passer à la 3D. Le contenu a également largement évolué vers une brutalité quasi rituelle entre l'homme machine et « le corps orificiel, le corps trou » de la femme3.

Derrière ces quelques évidences, il y a des êtres qui subissent des traitements inhumains qui les rabaissent souvent au rang animalier pour le simple plaisir de la libido du spectateur et le profit des entrepreneurs-souteneurs. Et les dommages collatéraux peuvent parfois devenir irréversibles.


Le X, comme la prostitution ?

Dans son livre Hard, paru en 2001, R. Anderson, ex-actrice de X disait déjà : « Actrice de X et pute, c'est pareil, seul le décor change ». Les points communs entre ces deux univers peuvent se décliner à l'infini. Ils ont pour origine un abus sexuel, pour moteur la contrainte et l'exploitation, et pour résultat la stigmatisation, les fêlures et souvent pire...

En janvier dernier, Cora, une star du porno allemand, décédait suite à une 6ème opération de chirurgie esthétique. Car le dictat œuvre aujourd'hui jusque dans la modélisation de ces corps qui finissent par tous se ressembler et se dépersonnaliser. Les hardeuses sont alors prises dans un processus qui les broient parce qu'il faut répondre aux critères du métier. Pas responsable l'industrie, non vraiment, on n'oblige personne ? Dans une récente interview4, l'ex-hardeuse Yasmine déclarait pourtant s'être « conformée à leurs normes » pour justifier ses différentes opérations.

Comme dans la prostitution, le choix, ou plutôt le non choix, a pour origine un traumatisme. Pour Yasmine, « chaque fille porte une blessure, (...) les exceptions sont rarissimes. ». Pour R. Poulin, « l'un des principaux facteurs de recrutement reste, comme pour les personnes prostituées, l'agression sexuelle pendant l'enfance et ses séquelles ». Toutes les études insistent sur ces faits. Même le documentaire, « Shocking Truth », donne la parole à un producteur de porno suédois qui revient sur ce point : « Ce sont très souvent d'anciennes victimes de viols ou d'inceste dans l'enfance ». On continue ?


La contrainte

La contrainte commence dès la signature du contrat entre l'actrice et le producteur. Il y a d'abord la cession des droits à l'image. Yasmine, elle, les a cédés pour 99 ans. Et son cas n'est pas isolé. Les filles sont alors dans « l'impossibilité de contrôler leur image quand elles quittent le métier»5. La contrainte n'est qu'apparente mais les pressions sont énormes. « Ils contrôlaient mes fréquentations avec surveillance de loin » ajoute Yasmine. Elles sont sans arrêt prises dans le chantage du remplacement. « Vous devez faire ce qu'on vous dit sur un plateau sinon on vous remplace illico ». Et comme dans la prostitution, ce sont surtout les producteurs (souteneurs ?) qui ramassent l'argent. 20 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2009 pour Dorcel quand sa star Yasmine culminait à 4500 euros par mois. Et combien pour les anonymes ?... Vous avez dit exploitation ?


La violence

« Dans les scènes hard, elles ont plus souvent des tics de souffrance que de jouissance »6. On apprend encore que certains acteurs ou actrices se piquent pour supporter certains tournages. Un autre point commun avec la prostitution. Pour I. Sorente, « derrière chaque trou rempli, il y a un être humain, un corps, qui souvent, saigne entre les scènes et qui s'évanouit pendant les plans coupés »7.

Combien de films aujourd'hui mettent en exergue cette violence ? Ils sont légions, souvent au titre évocateur et montrent sans retenue des coups, plus ou moins violents, sur le corps des femmes, des objets improbables qu'il faut faire rentrer au plus profond des corps, par tous les trous et bien sûr pour le plus grand plaisir de ces dernières qui ne peuvent être que demandeuses...

Et oui messieurs, tout cela a un prix. Derrière toutes ces jaquettes de dvd, toutes ses vidéos à la demande disponibles en un tour de clic, il y a bien une gigantesque entreprise à broyer de la chair. Juste une destruction en règle des corps pour notre simple plaisir et celui des producteurs. Cela en vaut-il vraiment la peine ? Certaines hardeuses sont parfois obligées de porter des couches parce que leurs muscles sont morts à force de tournages violents. Une autre s'est retrouvée en chaise roulante suite à un gang bang. Alors, glamour le porno ?


Maladies et syndromes post-traumatiques

On ne compte plus aujourd'hui les vies brisées par une carrière, même courte dans le porno... Maladies, suicides, overdoses n'épargnent pas les ex-acteurs ou actrices retirés de ce milieu. Une fois que le kleenex a servi, il faut le jeter. Aux Etats-Unis s'est créée l'Adult Industry Medical Healthcare Foundation pour leur apporter conseils, traitements, programmes de soutien et formations. Les ITS et le VIH touchent de nombreux hardeurs et hardeuses. C'est une réalité. « En 2006, plus de 600 cas de VIH et autres ITS ont été rapportés dans le milieu du X ».


Conclusion

Si le X se rapproche aujourd'hui de la chirurgie dans sa façon de filmer les corps et les rapports, c'est pour satisfaire la demande du client. Plus c'est crade, plus ça se vend. Que restera-t-il à montrer une fois que la caméra sera rentrée à l'intérieur des corps ? Au-delà de ces interrogations qui m'interpellent sur la réalité du désir masculin, je me demande ce que produirait comme effet en France un documentaire sur les réalités de ce milieu ? Peut-être pas grand chose. Espérer que « la réalité physique atroce contribue à une diminution considérable de l'excitation provoquée par les images » est un procédé qui a déjà été testé sans grand succès. Au moins nous continuerons à faire entendre notre point de vue.

 

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1 - Jerry Ropelato, « Internet pornography statistics – top ten reviews », 2006 (http://internet-filter-review.toptenreviews.com/internet-pornography-statistics.html)
2 - Richard Poulin, Sexualisation précoce et pornographie, La Dispute, 20093 - Michela Marzano La pornographie ou l'épuisement du désir, Éd. Buchet Chastel, 2003
4 - Magazine Les Inrockuptibles, Janvier 2011
5 - Virginie Despentes, King Kong Théorie, Grasset, 2006
6 - Coralie Trinh Thi sur le blog Les furies, le vrai visage de la prostitution », 2004
7 - Isabelle Sorente « GANG BANG. La pornographie, bagne sexuel industriel » - 2002 (http://1libertaire.free.fr/pornographiebagnesexuel.html)

 

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