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Trois condamnations pour traite d’êtres humains au TGI de Paris : la Fondation Scelles était partie civile

C’est le courage de l’une des victimes de traite d’êtres humains, qui aura permis la condamnation à Paris, de trois prévenus, deux Nigérians et un Haïtien, à de lourdes peines d’emprisonnement - 6 ans pour les 2 premiers et 3 ans pour le dernier - et amendes, pour proxénétisme aggravé et association de malfaiteurs. Dans le cadre de ce procès des 18 et 19 juin dernier, les trois trafiquants ont en outre été condamnés solidairement à payer la somme de 3 000 euros au titre de dommages-intérêts à la Fondation Scelles qui s’était constituée partie civile dans cette affaire >>>

 

 

Un verdict à la hauteur de la gravité des faits 

La tendance à l’accroissement des peines dans les affaires de proxénétisme semble se confirmer. Les auteurs d’un trafic d’êtres humains en provenance du Nigeria, originaires de ce pays pour deux d’entre eux, Haïtien pour le troisième, ont été condamnés à l’issue de l’audience correctionnelle de la 16ème chambre 1ère section du TGI de Paris les 18 et 19 juin derniers : les deux prévenus nigérians, chacun à 6 ans d’emprisonnement avec 2/3 de période de sureté, 50 000 euros d’amende, outre une interdiction définitive du territoire, et le troisième à 3 ans d’emprisonnement dont 18 mois avec sursis et 10 000 euros d’amende.

 

Un long parcours d’exploitation

Cette affaire s’illustre par une contrainte physique, psychologique et financière exercée par les trafiquants sur les victimes à tous les stades de la traite et du proxénétisme aggravé :

-       lors de la cérémonie du « juju » qui permet la mise en condition des victimes, et qui est teintée de sorcellerie, de vaudou et des croyances locales promettant l’enfer en cas de violation du serment de rembourser la dette couvrant les dépenses exorbitantes du voyage ;

-       lors du séjour dans les camps de Libye et d’Italie ;

-       lors des négociations avec les passeurs ;

-       lors de l’acheminement des victimes en France.

L’accueil en France des victimes par le couple de nigérians les conduira sans transition sur le trottoir parisien où un emplacement a été acheté pour elles à Château Rouge, afin de  pratiquer une prostitution de voie publique de 18 h à 4 h du matin.

L’une des victimes est en fin de grossesse à son arrivée en France mais elle devra se soumettre aux exigences de ses proxénètes jusqu’aux premières douleurs et reprendre son activité après l’accouchement, sous la menace de mettre délibérément l’enfant en danger.

La rentabilité insuffisante de l’une des victimes partie civile l’a exposée à des violences et à des menaces sur sa personne. Il a même été question entre les proxénètes de la revendre si elle ne travaillait pas davantage.

Ces déclarations de l’un des trafiquants à sa co-prévenue, recueillies sur écoutes, sont accompagnées de la décision de ne jamais plus accueillir de jeunes femmes enceintes ou de les faire avorter avant leur arrivée en France.

Les revenus des passes étaient intégralement récupérés par les proxénètes, de même que les allocations de réfugiées des victimes, et leurs cartes bancaires leur avaient été retirées.

 

Pour aller plus loin >>>

LE VISAGE TOUJOURS PLUS INQUIETANT DE LA PROSTITUTION NIGERIANE : Sur le terreau fertile du chaos géopolitique et de l'emprise de mafias tentaculaires

Nigéria - Rapport mondial 2016 de la Fondation Scelles, Prostitutions. Exploitations, Persécutions, Répressions

 

Le courage des victimes

Pourtant aucune des formes de chantage, de violences ou de cruauté mentale utilisées contre ces victimes parties civiles n’aura suffi à obtenir d’elles le silence ou la résignation attendus dans ce contexte de mise en esclavage.

C’est grâce au courage de l’une de ces victimes que la procédure d’information a pu être ouverte. Si cette victime n’a pas été présente aux débats mais simplement représentée, c’est parce qu’elle a été destinataire de menaces de mort entre l’audience de fixation et l’audience au fond deux mois plus tard.

Lors de l’audience, la Fondation Scelles a pu souligner les conditions particulièrement odieuses de cette exploitation sexuelle et rappeler le contexte dans lequel les trafiquants nigérians opèrent régulièrement. Le travail quotidien et l’utilité des recherches de la Fondation sur les modalités de cette exploitation ont été reconnues par le Tribunal à travers l’allocation de dommages-intérêts. C’est une première qui valide et encourage un engagement de longue haleine.

 

Pour aller plus loin >>>

Issues of resettlement initiatives from voluntary associations (the challenge of resettling those who have been trafficked, with special reference to Nigeria)

Assisting Victims of Human Trafficking: Best Practices in Legal Aid, Compensation and Resettlement

 

La Fondation Scelles s’est récemment engagée dans le combat judiciaire dans le cadre de ses nouvelles activités juridiques, pour combattre le proxénétisme et faire entendre dans les prétoires la voix des victimes, le plus souvent réduites à l’absence et au silence. Ce procès devant le TGI de Paris est le troisième dans lequel elle s’est constituée partie civile en 2018. Pour cela, elle a développé des partenariats avec le Cabinet Proskauer France et le Cabinet Brown pour des collaborations pro bono. Cette mission vient compléter ses actions en matière de lutte contre la demande, notamment à travers les stages de sensibilisation à la lutte contre l’achat d’actes sexuels, qu’elle assure depuis septembre 2017, en partenariat avec le Parquet de Paris et l’APCARS.

 

 

La Fondation Scelles dans la presse

  • (ES - Milenio) El ser humano no está a la venta
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