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Comité de suivi de la loi prostitution : un engagement fort de la ministre mais l’impunité toujours de mise

CP du 08 février 2023

 

Nous, associations de terrain accompagnant les personnes en situation de prostitution, agissant en prévention et au sein des stages de sensibilisation contre l'achat d'actes sexuels, saluons la volonté politique forte d'Isabelle Rome, ministre déléguée à l'Egalité femmes hommes, qui réunissait ce matin le comité de suivi de la loi du 13 avril 2016.

 

La ministre a démontré une volonté politique qui marque un réel engagement et une compréhension de la nécessité d'accélérer et d'améliorer la mise en œuvre de la loi de lutte contre le système prostitutionnel. Nous prenons acte de la volonté de Mme Rome de réunir ce comité de suivi deux fois par an, et d'impulser auprès de tous les ministères concernés une nouvelle dynamique autour de cette politique publique. Sur les parcours de sortie, Mme Rome a souligné à quel point ce dispositif est précieux pour les personnes concernées. Aujourd'hui, elles sont 643 en PSP, un chiffre certes encore trop faible mais qui augmente chaque année.

 

1 enquête pour proxénétisme quand il y en 1000 pour trafic de stupéfiants

 

L'absence de Gérald Darmanin et d'Éric Dupont-Moretti, ministres de l'Intérieur et de la Justice, montre a contrario un réel manque de volonté politique pour faire avancer l'application de la loi. Nous le regrettons.

 

C'est d'autant plus dommageable que les personnes présentes qui représentaient ces ministères, ont montré de grandes qualités d'échange et une volonté de faire mieux, mais elles-mêmes font état du peu de moyens à leur disposition pour réussir.

 

Ainsi les services de l'OCRTEH[1] ont seulement 18 enquêteurs sur toute la France, pour 200 dans la lutte contre le trafic de stupéfiants ! Et de fait, en 2022, il y avait en France 1 enquête pour proxénétisme pour 1000 enquêtes pour trafic de stupéfiants !

 

Sur la pénalisation des "clients", la ministre a déploré sa faible application, en rappelant que c'est par la pénalisation des clients que l'on peut faire baisser le sentiment d'impunité des acheteurs. Or avec 168 stages en 2022 et environ 458 condamnations au total, c'est beaucoup trop peu pour changer la donne.

 

Le comité de suivi a par ailleurs permis de révéler que l'an dernier, il y aurait eu seulement une vingtaine de condamnations pour recours à la prostitution de mineur·es. Alors que tous les acteurs s'accordent pour dire que le nombre de victimes augmente, c'est intolérable !

 

Nous avons demandé à la ministre la tenue d'un groupe de travail pour identifier les difficultés d'application de la loi sur la pénalisation des "clients" prostitueurs de mineur·es et trouver des solutions rapides et concrètes.

 

La loi existe depuis plus de 20 ans et l'Etat fait toujours les mêmes constats du peu de condamnations sans que rien ne change. Sans recours à la prostitution, la prostitution et le proxénétisme n'existeraient pas. L'impunité des pédocriminels est inacceptable. L'inaction des pouvoirs publics l'est tout autant.

 

A l'issue de ce comité dont nous saluons encore une fois la qualité, nous demandons au gouvernement :

 

· D'inscrire la lutte contre le système prostitutionnel dans les politiques prioritaires du gouvernement pour 2023 que la Première ministre Elisabeth Borne doit annoncer la semaine prochaine.

 

· D'augmenter très fortement les moyens d'action des associations comme des administrations dans la lutte contre ce système qui fait chaque année de nouvelles victimes.

 

· De financer et lancer des campagnes de sensibilisation du grand public à l'échelle nationale pour que la loi soit expliquée et comprise, et d'information des victimes quant à leurs droits.

 

· De réintégrer de façon explicite et visible aux niveaux local et national la prostitution dans la politique publique de lutte contre les violences faites aux femmes.

 

[1] Office central de répression de la traite des êtres humains

 

Une 2e évaluation locale de la mise en œuvre de la loi 2016-44 Pourquoi ? Comment ? Quels résultats ?

En octobre 2019, la Fondation Scelles présentait les conclusions du Rapport d’évaluation locale de la mise en œuvre de la loi 2016-444, réalisé par les sociologues Jean-Philippe Guillemet et Hélène Pohu, avec le soutien de la Direction Générale de la Cohésion Sociale. Aujourd’hui, presque sept ans après l’adoption de la loi, l’équipe de 2019 se retrouve pour poursuivre ce travail sur de nouveaux territoires et de nouvelles thématiques.

 

Rapport Evaluation Locale

 

>> RAPPORT D'ÉVALUATION LOCALE DE LA MISE EN OEUVRE DE LA LOI 2016-444 "visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées"

>> Brochure du Rapport

 

Quatre territoires aux contextes différents

Selon le principe établi dans la première évaluation locale, l’étude porte sur quatre villes de densités démographiques différentes et aux situations prostitutionnelles diverses. Après Bordeaux, Narbonne, Paris et Strasbourg, il s’agit de Limoges, Marseille, Nantes et Toulouse. Aucun a priori sur le niveau de mise en œuvre de la loi sur ces territoires n’a motivé ces choix.

 

Des objectifs nouveaux

Le principal objectif de cette nouvelle évaluation est évidemment d’analyser les processus de mise en œuvre de la loi : quels sont les freins et les obstacles à l’application de la loi dans chaque ville ? quels sont aussi ses facteurs facilitateurs et les bonnes pratiques développées sur chaque territoire ? quel regard les acteurs et actrices en charge de la loi portent-ils sur leur mission ? Mais, près de sept ans après l’adoption de la loi, alors que les premiers parcours de sortie de la prostitution (PSP), institués par la loi, sont arrivés à leur terme, un nouvel objectif s’imposait : analyser et comprendre le vécu des personnes en parcours, s’interroger sur les sorties et les suites des parcours de sortie de la prostitution.

 

Pour répondre à ces questions, plus d’une cinquantaine d’entretiens ont été réalisés, pour la plupart entre décembre 2021 et avril 2022 : 2 Directrices régionales aux droits des femmes et à l’égalité, les Déléguées départementales aux droits des femmes et à l’égalité de chaque territoire, l’ensemble des 8 associations agréées mobilisées sur le volet social, les différentes institutions et structures impliquées sur les autres volets de la loi (la prévention en milieu scolaire, la pénalisation et les stages de lutte contre l’achat d’actes sexuels). Des personnes en PSP et sorties du PSP ont également été interrogées sur leur expérience du parcours et leur vision de la loi.

 

D’une évaluation à l’autre…

 

Deux constats principaux émergent de cette étude. D’abord, aujourd’hui comme en 2019, la loi est encore partiellement mise en œuvre. Il n’y a pas un seul territoire où tous les volets de la loi sont effectifs. En l’absence de portage national, la mise en œuvre de la loi continue de reposer entièrement sur les épaules des acteurs locaux, acteurs locaux qui ne sont pas toujours suffisamment informés et sensibilisés à la loi et à la vision qu’elle porte. C’est ce qui explique que certains axes de la loi sont peu ou difficilement appliqués. Pensons en particulier à la pénalisation de l’achat d’actes sexuels qui se heurte toujours à une forte résistance de la part des services de police.

 

Le volet social, par contre, domine et fédère les énergies. Il est ressenti sur le terrain comme l’axe prioritaire de la mise en œuvre de la loi et est véritablement porté par les Déléguées départementales aux droits des femmes et les acteurs·trices locaux·ales. Les commissions départementales, au cœur de ce volet, fonctionnent et construisent progressivement, parfois dans la difficulté, un regard différent sur les acteur·trice·s en place et, plus important, sur les victimes elles-mêmes : à la méfiance et à la suspicion ont souvent succédé le dialogue et la confiance réciproque.

 

Au moment de l’étude, les quatre territoires étudiés comptabilisaient au total 162 parcours de sortie dont 60 terminés. Pour ces personnes, la loi a été ¨une chance¨ : la possibilité d’avoir une nouvelle vie, avec un emploi, des papiers, un logement et une confiance reconstruite. Pour elles, comme pour les associations qui accompagnent le dispositif, le bilan est positif : ¨C’est une loi qui sauve des vies, au sens propre et au figuré¨.

 

>> RAPPORT D'ÉVALUATION LOCALE DE LA MISE EN OEUVRE DE LA LOI 2016-444 "visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées"

>> Brochure du Rapport

 

 

CP Fondation Scelles/Mouvement du Nid - 6 ans après : l’application de la loi prostitution plus que jamais urgente et nécessaire !

Six ans après son entrée en vigueur le 13 avril 2016, la mise en oeuvre pleine et entière de la loi visant à renforcer la lutte contre le système prostitueur et à accompagner les personnes prostituées s’impose plus que jamais comme une urgence.

 

            Nous demandons donc à nouveau une mise en oeuvre pleine et entière de la loi avec :

•          Des moyens financiers pour 4000 parcours de sortie par an, ce sont des moyens pour des dispositifs très demandés et qui ont fait leurs preuves.Ce sont de nouveaux droits pour les personnes en situation de prostitution.

•          Le renforcement de la lutte contre toutes les formes de proxénétisme.

•          La généralisation de sessions de prévention de l'exploitation sexuelle en collèges et lycées

•          Enfin, il faut expliquer, informer, communiquer sur la réalité de ce système, qui prend sa source dans la demande des prostitueurs. Il est temps de mettre fin à leur impunité en appliquant la loi avec détermination.

 

timeline abolitionniste FACTS

 

Alors que deux modèles de société s’affronteront le 24 avril dans les urnes à l’occasion du deuxième tour de la présidentielle, nous rappelons l’urgence de mettre en oeuvre une loi qui est la seule à même d’offrir des droits et des alternatives aux personnes en situation de prostitution.

 

Non partisanes, nos associations se doivent pourtant de rappeler aujourd’hui deux points importants :

 

•          Une inquiétude forte face au risque d’un modèle, celui de l'extrême droite, incompatible avec les valeurs républicaines, qui priverait une partie des êtres humains vivant sur le territoire de leurs droits fondamentaux. Aujourd'hui déjà trop souvent (et demain encore) de nombreuses femmes victimes de violences risquent d’être expulsées alors qu’elles doivent être aidées et protégées.

 

•          La nécessité d'exiger du président sortant s’il est réélu, qu’il mette enfin tout en oeuvre pour que cette loi puisse produire tous ses effets en faveur des personnes prostituées, contre le système prostitueur, comme nous le lui avons écrit suite au 1er tour de la présidentielle.

 

Dans ce courrier, nous disons à Emmanuel Macron que « nous ne voulons pas revivre les cinq dernières années pendant lesquelles la loi d’avril 2016 a été appliquée a minima ». Face à l’extrême-droite qui s’est toujours positionnée du côté des clients de la prostitution, nous le mettons au défi de faire « de la législation juste, progressiste et profondément féministe que s’est donnée la France, un succès » et lui demandons « des engagements en termes de moyens et de volonté politique pour faire cesser l'impunité des prostitueurs et assurer des alternatives à la prostitution pour toutes celles qui le souhaitent. »

 

Cette exigence, nous nous engageons à la porter sans relâche, car c’est le le seul moyen d’aller vers une société libérée de la prostitution, qui fait encore aujourd’hui au moins 40 000 victimes en France, parmi lesquelles de très nombreux·ses mineur·es.

 

Nous continuerons tant qu’il le faudra à oeuvrer pour que cette loi progressiste, qui offre de nouveaux droits aux victimes d’un système de violences masculines, soit pleinement appliquée. Et nous continuerons évidemment à accompagner toutes les victimes du système de façon inconditionnelle.

 

>> Retrouvez les revendications de notre manifeste pour la présidentielle sur le site Abolition2022.fr

 

Un consensus large pour appliquer la meilleure loi sur le système prostitutionnel !

« La France a la meilleure loi, la plus complète et globale du monde sur la prostitution »

Taina Bien-Aimé, directrice, CATW (Coalition Against Trafficking in Women)

 

l'ascenseur abolitionniste - présidentielles 2022 - Roussel, Hidalgo, Mélenchon, MAcron, Pécresse, Jadot, Poutou 

 

L’ “ascenseur abolitionniste”, réalisé par le Mouvement du Nid et la Fondation Scelles à partir de réponses au questionnaire envoyé aux candidat·es, montre que celles et ceux-ci ont compris l'importance de la mise en œuvre pleine et entière de la loi du 13 avril 2016, « la meilleure loi globale » sur la question, comme le soulignait il y a quelques jours à New York la directrice de la CATW.

 

Face au cynisme de l'industrie du sexe et de ses défenseurs qui n'hésitent pas à se servir de la guerre en Ukraine pour "recruter", et à l'urgence de lutter contre le système prostitueur, c'est une bonne nouvelle. Le pouvoir exécutif qui prendra place en France pour les cinq prochaines années disposera d’un large consensus pour conforter et améliorer le modèle abolitionniste. En effet, cinq des sept candidat·es à qui nous avons envoyé notre questionnaire demandant des engagements concrets pour une application pleine et entière de la loi du 13 avril 2016, de la gauche à la droite républicaine, se sont positionnés favorablement.

 

Trois d'entre eux (Roussel, Hidalgo, Mélenchon), fidèles à leur engagement de longue date pour l’abolition, ont même répondu directement à notre questionnaire, et nous ont assuré de leur volonté de s'engager pour des parcours de sortie à la hauteur de l'enjeu : Fabien Roussel et Anne Hidalgo ont répondu point par point être d'accord avec nos propositions concrètes, en particulier de donner les moyens pour 4000 parcours de sortie de prostitution par an pendant 10 ans.

 

Jean-Luc Mélenchon, de son côté, a répondu en réaffirmant son engagement abolitionniste et la volonté de lutter plus spécifiquement contre …

 

Deux autres ne nous ont pas envoyé de réponse, mais se sont positionnés en faveur de la loi abolitionniste. L'équipe du Président actuel, Emmanuel Macron, a affirmé vouloir poursuivre sa mise en œuvre. Quant à Valérie Pécresse, elle s'est prononcée publiquement contre la marchandisation des corps des femmes et pour la pénalisation des prostitueurs (sans pour autant donner de réponses concrètes sur les mesures qu'elle mettrait en œuvre).

D'ici le premier tour, nous espérons recevoir de nouvelles réponses et des précisions, qui permettraient à chaque candidat·e d'atteindre le sommet de l'ascenseur abolitionniste... ou de rester au sol, dans le « vieux » monde, où règne le droit des hommes « clients » à acheter des femmes pour du sexe.

 

>>> Retrouvez nos décryptages des positions des candidat·es sur le site abolition2022.fr

 

 

 

 

Un 8 mars au paroxysme des violences sexuelles et de l’exploitation des femmes

Le 8 mars, journée internationale des droits des femmes est traditionnellement le moment d’un état des lieux, d’un tour d’horizon des progrès ou des reculs des questions liées aux femmes (lutte contre les discriminations, accès à l’égalité, l’éducation, la santé…). Mais quels espoirs nourrir en ce 8 mars 2022 à la lumière des récents bouleversements du monde ?

 

 

Depuis des années, les femmes ouïghoures subissent des tortures et des violences sexuelles dans les camps chinois, à la quasi-indifférence des instances internationales.

 

Eté 2021, le retour au pouvoir des Talibans a marqué l’effondrement des droits (naissants) des femmes afghanes, désormais enfermées et plongées dans l’esclavage sexuel des mariages forcés .

 

Aujourd’hui, la guerre ravage l’Ukraine. Des femmes s’engagent pour participer à la résistance de leur pays. D’autres partent pour assurer la protection de leur famille. D’autres encore endurent les bombardements russes dans la peur et l’angoisse, terrées dans des caves. Pour toutes, on le sait, la guerre sera aussi synonyme de violences et d’exploitation sexuelles.

 

Dès le 4 mars, le ministre ukrainien des Affaires étrangères alertait sur les nombreux cas de viols commis par des soldats russes.  Des témoignages dénonçant de tels faits à Kherson, la première ville ukrainienne tombée entre les mains des Russes, commencent à nous parvenir : « [Les soldats russes] ont déjà commencé à violer nos femmes. L’information vient d’individus que je connais personnellement. C’est arrivé à une jeune fille de 17 ans et ils l’ont tuée », raconte une habitante de Kherson à CNN.

 

Déjà plus d’un million et demi de personnes, en majorité des femmes et des enfants, ont trouvé refuge dans les pays limitrophes. Déjà les trafiquants et les proxénètes affluent sur ces zones frontalières pour exploiter l’extrême détresse de ces femmes en fuite et répondre à une « forte demande » : le jour même de l’invasion russe, les termes de recherche « Ukrainian girls » et « Ukrainian porn » explosaient sur les sites de pornographie.

 

Et la guerre, après la crise de la Covid, met douloureusement en lumière une autre forme d’exploitation et de marchandisation du corps des femmes : la Gestation Pour Autrui (GPA). Les médias s’attendrissent sur ces couples venus du monde entier en Ukraine pour récupérer « le bien qu’ils ont payé », leurs bébés et leurs embryons. Mais qui parle des mères porteuses ? Ces femmes, qui, pour beaucoup d’entre elles, ont déjà fui la violence de la guerre du Donbass, sont aujourd’hui parquées dans des abris aménagés par les agences qui les emploient, contractuellement privées de toute liberté de mouvement. Que deviendront-elles avec leurs nouveaux-nés dans les jours et les semaines à venir ?

 

Que souhaiter alors en ce 8 mars, supposé célébrer les progrès de la cause des femmes dans le monde ? Nous appelons les instances internationales à prendre toutes les mesures pour assurer la protection des femmes et filles attaquées dans leur liberté, leur dignité, leurs droits, qu’elles soient afghanes, ouïghoures ou ukrainiennes. Car, à travers elles, ce sont les femmes du monde entier qu’on attaque.

 

 

 

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  • (ES - Milenio) El ser humano no está a la venta
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